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Frères et sœurs, quel plaisir d’être avec vous pour cette session 2017 de la Semaine de l’éducation de l’université Brigham Young. Le thème de l’année est tiré de D&A 50:24, avec un accent particulier sur la phrase : « et celui qui reçoit la lumière et persévère en Dieu reçoit davantage de lumière. »
Je vais aborder ce thème d’une manière différente et certainement inattendue en mettant en évidence et en illustrant les moyens rusés et très efficaces que le « malin » utilise pour empêcher les gens de progresser et de recevoir plus de lumière (D&A 93:39).
Beaucoup de principes de l’Évangile vont par paires, c’est-à-dire l’un n’est pas complet sans l’autre. Je ferai référence à trois de ces paires doctrinales aujourd’hui :
- Le libre arbitre et la responsabilité
- La miséricorde et la justice
- La foi et les œuvres
Lorsque Satan parvient à diviser ces paires doctrinales, il commence à faire des ravages dans l’humanité. C’est là l’une de ses stratégies les plus rusées pour empêcher les gens de grandir dans la lumière.
Vous savez déjà que la foi sans les œuvres n’est pas vraiment de la foi (voir Jacques 2:17). Je vais principalement me concentrer sur les deux autres paires doctrinales : d’abord, pour illustrer comment le fait d’éviter la responsabilité affecte le libre arbitre ; et ensuite, comment le fait de « [nier] la justice », tel que c’est mentionné dans le Livre de Mormon (voir Alma 42:30) affecte la miséricorde.
Le Livre de Mormon nous enseigne que nous sommes acteurs de notre propre vie pour « agir […] et non pour être contraints » (2 Néphi 2:26) – ou « libres d’agir par [nous]-mêmes » (2 Néphi 10:23). Cette liberté de choix n’a pas été donnée partiellement mais complètement, à cent pour cent. Donnée d’une manière absolue dans le sens où un parent parfait ne force jamais ses enfants. Il nous montre la voie, et il peut même nous commander, mais « néanmoins, tu peux choisir par toi-même, car cela t’est donné » (Moïse 3:17).
Assumer ses responsabilités et rendre des comptes sur nos choix sont les principes complémentaires du libre- arbitre (voir D&A 101:78). Être responsable c’est se reconnaître comme étant la cause des effets ou des résultats de ses choix – les bons comme les mauvais. D’un point de vue négatif, c’est de toujours admettre les conséquences de ses mauvais choix.
La doctrine de l’Évangile nous enseigne qu’en dehors des personnes innocentes, comme les petits enfants et les personnes handicapées mentales, chaque personne est responsable de l’utilisation de son libre-arbitre et « ser[a] puni[e] pour [ses] propres péchés » (Articles de foi 1:2)1. Ce n’est pas uniquement un principe divin mais aussi une loi naturelle – on récolte ce que l’on sème.
Donc logiquement, un libre-arbitre complet et total vient avec une responsabilité complète et totale :
Et maintenant, souvenez-vous, souvenez-vous, mes frères, que quiconque périt, périt à lui-même ; et quiconque commet l’iniquité, la commet contre lui-même ; car voici, vous êtes libres ; il vous est permis d’agir par vous-mêmes ; car voici, Dieu vous a donné la connaissance et il vous a rendus libres. [Hélaman 14:30 ; emphase ajoutée]
Le principe de Korihor : séparer le libre-arbitre de la responsabilité
Une des stratégies les plus rusées de Satan pour prendre le contrôle de notre libre-arbitre n’est pas une attaque frontale sur cette liberté mais une approche sournoise par derrière sur la responsabilité. Sans cette responsabilité, chaque bon don de Dieu pourrait être mal utilisé à des fins malveillantes. Par exemple, la liberté d’expression sans responsabilité peut être utilisée pour créer et protéger la pornographie. Les droits des femmes pourraient être détournés pour justifier un avortement que l’on pourrait éviter. Quand le monde sépare le choix de la responsabilité, cela conduit à l’anarchie et à une guerre d’opinion ou la survie des plus aptes. Nous pourrions donner à ce choix sans responsabilité le nom de principe de Korihor, comme nous pouvons le lire dans le livre d’Alma « tout homme conquérait selon sa force, et tout ce qu’un homme faisait n’était pas un crime » (Alma 30:17 ; emphase ajoutée). En enlevant les conséquences négatives, votre libre-arbitre se retrouve maintenant débridé, comme si le jour du jugement n’existait plus.
Le principe de Néhor : nier la justice
Si Satan ne réussit pas complètement à séparer le libre-arbitre de la responsabilité, l’un de ses plans de repli est d’insensibiliser ou de minimiser les sentiments de responsabilité, ce que nous pourrions appeler le principe de Néhor, que l’on trouve également dans le livre d’Alma : « Que toute l’humanité serait sauvée au dernier jour, et qu’il ne devait pas craindre ni trembler, […] car le Seigneur avait créé tous les hommes et avait aussi racheté tous les hommes, et, à la fin, tous les hommes auraient la vie éternelle. » (Alma 1:4)
Quelle offre alléchante pour ceux qui cherchent le bonheur dans la méchanceté ! Le principe de Néhor repose entièrement sur la miséricorde et nie la justice, une séparation de la deuxième paire doctrinale mentionnée auparavant. Dénier la justice, c’est éviter la responsabilité. C’est essentiellement la même chose. Une stratégie commune à chaque antéchrist connu dans le Livre de Mormon était de séparer le libre-arbitre de la responsabilité. « Mangez, buvez et réjouissez-vous ; néanmoins, craignez Dieu : il justifiera si on commet un petit péché » (2 Néphi 28:8).
La foi sans les œuvres, la miséricorde sans la justice, et le libre-arbitre sans la responsabilité sont tous des couplets différents de la même chanson séduisante qui conduit à la damnation. Dans chacun d’eux, l’homme naturel rejette la responsabilité pour endormir sa conscience. Ceci est similaire au fait d’acheter des indulgences au début du 16ème siècle, mais là c’est beaucoup plus facile et c’est gratuit2 ! Il n’est pas étonnant alors que le chemin spacieux soit bondé de tant de monde. Ce chemin vante un voyage sans culpabilité vers le salut mais est, en réalité, un détour habilement déguisé vers la destruction (voir 3 Néphi 14:13).
Le libre-arbitre sans sa responsabilité est l’une des principales doctrines antéchrist – très rusée par nature avec des résultats dévastateurs.
La liste anti-responsabilité
Pour illustrer mes propos, voici une liste de choses que Satan donne envie de dire ou de faire pour éviter d’être responsable. Cette liste n’est pas exhaustive mais je crois qu’elle couvre les tactiques les plus fréquentes :
- Blâmer les autres : Saul désobéit en gardant les butins de guerre contre les Amalékites ; et quand Samuel le confronta, il blâma le peuple (voir 1 Samuel 15:21).
- Chercher à se justifier : Saul tenta alors de se justifier ou de justifier sa désobéissance en disant que les troupeaux encore vivants étaient pour « les sacrifier à l’Éternel » (1 Samuel 15:21 et 22).
- Trouver des excuses : les excuses viennent de mille manières comme celle-ci avec Laman et Lémuel : « Comment est-il possible que le Seigneur livre Laban entre nos mains ? Voici, c’est un homme puissant, et il peut en commander cinquante, oui, il peut même en tuer cinquante ; alors pourquoi pas nous ? » (1 Néphi 3:31).
- Minimiser ou banaliser le péché : c’est exactement ce que Néhor défendait (voir Alma 1:3-4).
- Se cacher : c’est une technique commune d’évitement. C’est une tactique que Satan a utilisé après qu’Adam et Ève eurent pris du fruit défendu (voir Moïse 4:14).
- Dissimuler : étroitement lié au fait de se cacher, c’est ce que David a tenté de faire en essayant de dissimuler sa liaison avec Bath-Shéba (voir 2 Samuel 12:9, 12).
- Fuir les responsabilités : c’est ce que Jonas a essayé de faire (voir Jonas 1:3).
- Abandonner ses responsabilités : similaire au fait de les fuir. Un exemple est celui de Corianton qui délaissa le ministère pour poursuivre la prostituée Isabel (voir Alma 39:3).
- Nier ou mentir : « Saül lui dit : […] J’ai observé la parole de l’Éternel. Samuel dit : Qu’est-ce donc que ce bêlement de brebis qui parvient à mes oreilles […] ? » (1 Samuel 15:13-14).
- Se rebeller : Samuel réprimanda alors Saül « pour sa rébellion ». « Puisque tu as rejeté la parole de l’Éternel, il te rejette aussi comme roi. » (1 Samuel 15:23).
- Se plaindre et murmurer : celui qui se rebelle se plaint aussi et murmure : « Tous les enfants d’Israël murmurèrent contre Moïse […] et […] leur dit : Que ne sommes-nous morts dans le pays d’Égypte ! » (Nombres 14:2).
- Trouver des fautes et se mettre en colère : ces deux- là sont étroitement liés, comme le décrit Néphi : « Et il arriva que Laman fut en colère contre moi et aussi contre mon père ; et Lémuel le fut aussi. » (1 Néphi 3:28).
- Exiger et réclamer des droits : « Nous ne voulons pas que notre frère cadet soit notre gouverneur. Et il arriva que Laman et Lémuel me prirent et me lièrent de cordes, et ils me traitèrent avec beaucoup de dureté » (1 Néphi 18:10-11).
- Douter, perdre espoir, abandonner et arrêter : « Notre frère est un insensé […] car ils ne croyaient pas que je pouvais construire un bateau » (1 Néphi 17:17-18).
- S’apitoyer sur soi-même et développer une mentalité de victime : « Voici, ces nombreuses années nous avons souffert dans le désert, temps pendant lequel nous aurions pu jouir de nos possessions et du pays de notre héritage ; oui, et nous aurions pu être heureux. » (1 Néphi 17:21).
- Être indécis ou dans une léthargie spirituelle : l’ironie de l’indécision est que si vous ne prenez pas une décision à temps, c’est le temps qui le fera pour vous.
- La procrastination : c’est la jumelle de l’indécision. « Mais voici, les jours de votre épreuve sont passés ; vous avez différé le jour de votre salut jusqu’à ce qu’il soit éternellement trop tard » (Hélaman 13:38).
- Permettre à la peur de régner : celle-ci est aussi liée au fait de se cacher. « J’ai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre […] Son maître lui répondit : Serviteur méchant et paresseux » (Matthieu 25:25-26).
- Complicité : Un exemple de complicité ou d’aide apportée à d’autres pour éviter la responsabilité est lorsqu’Eli échoua à discipliner ses garçons pour leurs péchés graves et qu’il fut réprimandé par le Seigneur : « Pourquoi foulez-vous aux pieds mes sacrifices […] Et d’où vient que tu honores tes fils plus que moi ? » (1 Samuel 2:29; voir aussi les versets 22–36).
En repensant à Laman et Lémuel, vous verrez qu’ils étaient coupables de presque chacun des points de cette liste. C’est elle qui a détruit Laman et Lémuel. C’est une liste extrêmement dangereuse.
En lisant 1 Néphi et 2 Néphi, on peut seulement essayer d’imaginer combien il a dû être difficile pour la famille de Léhi de quitter leur maison, d’obtenir les plaques d’airain, de vivre sous une tente pendant huit ans dans le désert, et de construire un grand bateau pour traverser l’océan. La responsabilité à laquelle cette famille a dû faire face était impressionnante. Pourtant, aussi difficile que cette responsabilité ait pu être, « la difficulté est l’excuse que l’histoire n’accepte jamais3 », comme le cas de Laman et Lémuel l’illustre si bien.
Les situations difficiles sont les tests de foi de chacun, pour voir si nous irons de l’avant avec un cœur plein de foi (voir D&A 64:34) ou plein de doute (voir D&A 58:29), ou tout simplement pas du tout. Une situation difficile révèle le caractère d’une personne et le rend plus forte, comme pour Néphi, ou l’affaiblit et le corrompt, comme pour Laman et Lémuel, qui incarne ce que signifie être irresponsable (voir Alma 62:41).
Les excuses ne valent pas les résultats
Il est important de reconnaître que les excuses ne valent jamais les résultats. Dans le cas de Laman et Lémuel, toutes les excuses du monde ne pourraient jamais obtenir les plaques d’airain. La raison pour laquelle Néphi a réussi à obtenir les plaques contrairement à Laman et Lémuel c’est parce que Néphi ne s’est jamais fourvoyé dans la liste anti-responsabilité. C’était un champion, et les champions n’utilisent jamais cette liste. Comme frère David B. Haight, du Collège des douze, l’a déclaré : « un homme déterminé trouve un moyen, l’autre trouve une excuse4. »
Si cette liste anti-responsabilité est si dangereuse, pourquoi tant de gens s’y tournent si fréquemment ? Parce que l’homme naturel est irresponsable par nature, il plonge dans cette liste par mécanisme de défense pour éviter la honte et la gêne, le stress et l’anxiété, et la peine et les conséquences négatives de ses erreurs et de ses péchés. Plutôt que de se repentir pour éliminer la culpabilité, il se berce d’excuses. Cela lui donne le sentiment erroné que c’est la faute de quelqu’un d’autre ou des circonstances et ne ressent donc pas le besoin de se repentir.
La liste anti-responsabilité pourrait aussi s’appeler la liste anti-foi parce qu’elle stoppe net tout progrès. Lorsque Satan tente une personne pour qu’elle évite la responsabilité, cette personne abandonne subtilement son libre-arbitre parce qu’elle n’est alors plus aux commandes, elle n’agit plus. Au lieu de cela, elle devient un objet qui est contraint, et Satan devient clairement maître de sa vie.
La différence entre trouver une excuse et donner une raison
Il est important de noter que tout le monde échoue occasionnellement, tout comme Néphi et ses frères dans leurs deux premiers voyages à Jérusalem pour obtenir les plaques. Mais ceux qui sont vaillants acceptent la responsabilité de leurs erreurs et de leurs péchés. Ils se repentent, se relèvent, et continuent d’avancer avec foi. Peut-être donneront-ils une raison pour expliquer leur échec mais pas une excuse.
Au premier regard, on pourrait croire qu’Adam rejetait la faute sur Ève lorsqu’il dit : « La femme que tu m’as donnée. » Toutefois, après avoir ajouté : « et j’ai mangé », nous comprenons qu’il a accepté la responsabilité de ses actes et qu’il les expliquait, mais sans en rejeter la faute sur Ève qui a son tour dit : « Et j’ai mangé. » (Moïse 4:18-19 ; voir aussi les versets 17-20 ; 5:10-11)
Le pouvoir et la récompense d’être responsable
Utiliser la liste anti-responsabilité est un acte d’auto- trahison. C’est s’abandonner et parfois abandonner les autres. En racontant les histoires suivantes, j’espère que vous verrez à quel point l’utilisation de la liste anti- responsabilité est contre-productif, même quand vous avez raison.
Première histoire : 100% responsable au centre de distribution
En 1983, un groupe de partenaires et moi avons démarré une société qui dispensait des séminaires de gestion du temps, créait et vendait des agendas journaliers.
Pour les séminaires de grandes entreprises, nous envoyions nos consultants au siège de la société où ils enseignaient dans les locaux dédiés à la formation des grandes entreprises. Avant le séminaire, deux employés dans notre centre de distribution devaient préparer et expédier plusieurs colis de matériel de formation, tels que des agendas journaliers, des classeurs, et des formulaires. Il y avait aussi un guide du participant d’une centaine de pages avec des citations, des exercices à trous, des graphiques, et des illustrations.
Normalement, les deux employés du centre de distribution envoyaient les colis dix jours avant le séminaire. Au moment où l’incident suivant est survenu, nous enseignions environ 250 séminaires par mois. Avec autant de séminaires par mois, ces deux employés commettaient souvent des erreurs comme le fait de ne pas envoyer les bonnes quantités ou d’oublier certains articles ou encore ne pas les envoyer à temps. C’était souvent gênant et exaspérant pour les consultants.
Quand ces problèmes arrivaient, la division des séminaires m’adressait une plainte puisque le centre de distribution était une de mes responsabilités. Lorsque je discutais avec ces deux employés de leurs erreurs et des améliorations du systèmes, ils ne voulaient jamais accepter la responsabilité de ces erreurs. Ils rejetaient la faute sur les autres en disant des choses comme : « Ce n’est pas notre faute. C’est la division des séminaires qui a mal rempli le bordereau de commande, et nous avons envoyé le colis comme ils l’ont demandé. C’est leur faute. Vous ne pouvez pas nous blâmer pour ça ! ». Ou alors ils disaient : « On a envoyé le colis à temps mais c’est la société de transport qui l’a remis en retard. Vous ne pouvez pas nous blâmer pour ça ! » Ils avançaient aussi une autre excuse du genre : « Ce sont les gens qui font les classeurs qui ont fait des erreurs dans les kits de séminaire. Nous avons envoyé les kits tels qu’ils nous ont été remis. C’est leur faute. » Apparemment ces deux employés n’étaient jamais responsables de ces erreurs, donc les erreurs continuaient.
Et puis une chose très importante est arrivée. La directrice de formation d’une grande multinationale a participé à un de nos séminaires. Elle a été tellement emballée qu’elle nous a invité à tester notre séminaire avec un groupe d’une cinquantaine de leurs meilleurs directeurs. Le jour du séminaire, notre consultant est arrivé et, en ouvrant les colis de matériel, a découvert qu’il manquait les guides. Sans ces guides, comment les participants prendraient-ils des notes ? Le directeur de formation était en pleine panique. Notre consultant fit tout ce qu’il pouvait en s’assurant que chacun des participants ait un bloc-notes pour prendre des notes tout au long de la journée, et le séminaire s’est plutôt bien déroulé, même sans les guides.
Extrêmement gênée et en colère, la directrice de formation a appelé notre division des séminaires en disant : « Vous n’enseignerez plus jamais ici ! Comment avez-vous pu faire une erreur aussi embarrassante et aussi inexcusable avec ce premier séminaire ? »
Un des plus hauts responsables de la division des séminaires m’appela, en colère pour me dire : « C’est notre dernière chance. Nous sommes en train de perdre un compte client d’un million de dollars à cause des erreurs du centre de distribution. Les erreurs ne sont plus acceptables ! »
En tant que l’un des propriétaires de la société, je ne pouvais plus accepter des erreurs pareilles non plus. Mais en même temps, je ne pouvais pas accepter l’idée de voir ces deux pourvoyeurs se faire renvoyer. Après avoir réfléchi à différentes solutions, j’ai décidé de mettre en place un système de récompense pour motiver ces deux hommes à faire plus attention. Pour chaque séminaire pour lequel il n’y aurait pas d’erreur de colis, ils recevraient un dollar de plus, donc la possibilité d’un bonus mensuel de 250 dollars, en espérant que ce serait suffisant pour qu’ils soient attentifs à la qualité de leur travail. Cependant, s’ils commettaient une erreur, perdre un dollar n’aurait pas eu un grand effet. J’ai donc décidé d’accorder en plus deux bonus de 100 dollars pour un travail sans erreur. A la première erreur, ils perdraient non seulement le dollar mais aussi le premier bonus de 100 dollars. S’ils commettaient une deuxième erreur, le deuxième bonus serait perdu à son tour.
J’ai également prévenu les employés en disant : « S’il y a une erreur, vous perdrez votre bonus, quelle que soit l’origine de cette erreur. Vous êtes responsables à 100% pour ces colis. »
« Mais ce n’est pas juste » ont-ils répondu. « Que se passera-t-il si la division du séminaire rempli mal le bordereau de commande, et si on ne s’en rend pas compte alors on va expédier le colis avec leur erreur ? »
Ma réponse fut : « Vous perdrez votre bonus. Vous êtes responsables à 100% de la bonne expédition de ces colis. »
« Mais ce n’est pas juste ! Et si on envoie les colis correctement mais la société de transport a du retard ? »
« Vous perdrez votre bonus. Vous êtes responsables à 100% »
« Mais ce n’est pas juste ! Et si la division qui prépare les kits commet des erreurs ? Vous ne pouvez pas dire que c’est notre faute ! »
« Vous perdrez votre bonus » ai-je répondu une fois de plus. « Vous êtes responsables à 100% de la bonne expédition de ces colis. Est-ce que vous comprenez ? »
« Ce n’est pas juste ! »
« Cela peut sembler injuste, mais c’est la vie. Vous perdrez votre bonus. »
J’avais éliminé la liste anti-responsabilité de leurs options. Maintenant ils savaient qu’ils ne pouvaient plus rejeter la faute sur les autres, trouver des excuses ou essayer de justifier les erreurs, même s’ils avaient raison de dire que ces erreurs n’étaient pas les leurs.
Ce qui s’est produit ensuite est absolument fascinant. Quand ils recevaient une commande de la division des séminaires, ils les appelaient pour réviser la commande article par article. Ils prirent la responsabilité de corriger toutes les erreurs commises par cette division. Ils commencèrent à lire les documents de la société de transport pour s’assurer que la bonne date était indiquée. Ils commencèrent à marquer les boîtes de colis « 1 sur 7 », « 2 sur 7 », etc., et le contenu sur l’extérieur du carton. Ils commencèrent à expédier les colis avec trois ou quatre jours d’avance. Quelques jours avant le début d’un séminaire, ils appelaient les clients pour vérifier la réception et le contenu des colis. Si d’une manière ou d’une autre ils avaient oublié du matériel, il leur restait trois ou quatre jours pour envoyer ce qui manquait. Les erreurs se sont finalement dissipées et les employés ont commencé à gagner leurs bonus chaque mois. En apprenant par eux-mêmes le pouvoir, le contrôle et la récompense d’être responsable à 100% cela a changé leur vie.
Ces deux employés ont appris qu’en rejetant la faute sur quelqu’un d’autre, ils abandonnaient le contrôle de la bonne expédition des colis à quelqu’un d’autre, comme la division des séminaires ou la société de transport. Ils ont appris que les excuses vous empêchent de prendre le contrôle de votre vie. Ils ont appris que rejeter la faute sur les autres, se trouver des excuses ou essayer de justifier des erreurs, même quand vous avez raison, se faisait à leur dépend. Dès que vous utilisez l’une de ces choses, c’est toujours à vos dépends, et vous perdez le contrôle sur les conséquences positives que vous recherchez.
Deuxième histoire : « Mon mariage avant mon orgueil »
Voici l’histoire d’une jeune mariée :
Comme dans n’importe quel mariage, mon mari et moi avons eu des différends. Mais il y a un incident qui ressort dans mon esprit. Je ne me rappelle plus la raison de notre désaccord, mais nous avons fini par ne plus nous parler du tout et je me rappelle avoir estimé que tout était la faute de mon mari. J’estimais n’avoir absolument rien fait dont je devrais lui demander de m’excuser.
Au fil de la journée, j’ai attendu que mon mari dise qu’il était désolé. Il devait sûrement voir à quel point il avait tort. Il devait être évident qu’il m’avait gravement blessée. J’estimais que je devais savoir me défendre ; c’était une question de principe.
Vers la fin de la journée, j’ai commencé à me rendre compte que j’attendais inutilement, alors je suis allée prier le Seigneur. J’ai prié pour que mon mari se rende compte de ce qu’il avait fait et du tort que cela faisait à notre mariage. J’ai prié pour que le Seigneur l’inspire à s’excuser pour que nous puissions mettre fin à notre différend.
Tandis que je priais, j’ai ressenti fortement l’impression que je devais aller trouver mon mari et lui demander de m’excuser. J’ai été un peu choquée par cette impression et j’ai immédiatement précisé dans ma prière que je n’avais rien fait de mal et que, par conséquent, ce n’était pas à moi de demander pardon. Une pensée s’est imposée à mon esprit : « Est-ce que tu veux avoir raison ou est-ce que tu veux être mariée ? »
En réfléchissant à cette question, je me suis rendu compte que je pouvais m’agripper à mon orgueil et ne pas céder jusqu’à ce qu’il ait présenté des excuses, mais combien de temps cela allait-il prendre ? Des jours ? J’étais malheureuse pendant que nous ne nous parlions pas. J’ai compris que cet incident lui-même n’allait pas mettre fin à notre mariage, mais que, si je restais inflexible, il pourrait faire de gros dégâts au fil des années. J’ai décidé qu’il était plus important d’avoir un mariage heureux et aimant que de garder mon orgueil intact pour un incident qui semblerait plus tard insignifiant.
Je suis allée trouver mon mari et je lui ai présenté des excuses pour l’avoir mis en colère. Il m’a demandé pardon, lui aussi, et bientôt nous étions heureux et de nouveau unis dans l’amour.
Depuis, il y a eu des occasions où j’ai dû me poser à nouveau cette question : « Tu veux avoir raison, ou tu veux être mariée ? » Comme je suis reconnaissante de la grande leçon que j’ai apprise la première fois que cette question s’est posée à moi ! Elle m’a toujours aidée à faire la part des choses et à faire passer mon mari et mon mariage avant mon orgueil5.
Dans cette histoire, cette sœur a appris que bien qu’elle ait raison et que ce soit la faute de son mari, rejeter la faute sur lui était contre-productif, perdant ainsi le contrôle sur les conséquences positives. Elle a aussi découvert la maîtrise et le pouvoir de l’expression « je suis désolée » lorsqu’elle est utilisée avec un amour sincère et avec empathie, pas juste pour nous excuser.
Dans un mariage, il pourrait paraître logique que chacun montre 50% de bonne attitude, mais ce n’est que lorsque chacun des deux conjoints montre 100% de bonne attitude que l’accès à la liste anti-responsabilité sera fermé. La dernière leçon apprise par cette sœur est que vous ne pouvez pas contrôler le libre-arbitre d’autrui – uniquement le vôtre.
Un jour, une mère aimante a donné ce sage conseil à sa fille qui était malheureuse de vivre un mariage en difficulté. Elle demanda à sa fille de tracer une ligne verticale au milieu d’une page et d’écrire, sur la partie de gauche, toutes les choses que son mari faisait qui la dérangeaient. Puis, sur la partie de droite, d’écrire comment elle répondrait à chacune de ces choses. Enfin, la mère lui demanda de couper la feuille en deux en suivant la ligne tracée pour séparer les deux listes.
« Maintenant, jette la liste avec les fautes de ton mari à la poubelle. Si tu veux être heureuse et améliorer ton mariage, arrête de te focaliser sur les fautes de ton mari et concentre-toi sur ton propre comportement. Examine ta manière de répondre aux choses qui te déplaisent et voient comment tu pourrais y répondre différemment, d’une manière plus positive. »
Cette mère comprenait le pouvoir et la sagesse émanant du fait d’être responsable à 100%.
Le plus grand exemple de tous
Bien sûr, le Sauveur est la personne la plus responsable de toute l’histoire du monde. Il est le plus grand exemple. Même quand ses moments de douleur et d’angoisse atroces, il ne s’est pas apitoyé sur lui-même, une de ces choses sur la liste qui ne marchent pas. Il pensait toujours aux autres, toujours désintéressé et soucieux des autres – guérissant l’oreille d’un soldat à Gethsémané et, plus tard, sur la croix, priant pour ceux qui s’étaient servis de lui malgré eux – en accomplissement de son propre commandement de le faire : « Père, pardonne-leurs ; car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Luc 23:34)
Plus nous sommes comme le Christ, moins nous aurons tendance à juger injustement, à laisser tomber quelqu’un, ou à cesser de servir une cause juste. Même si nous nous abandonnons parfois, le Sauveur ne nous abandonne jamais, car il est parfait dans sa longanimité : « Malgré leurs péchés, mes entrailles sont remplies de compassion pour eux. » (D&A 101:9)
Jésus-Christ n’est pas venu pour trouver des fautes, pour critiquer, ou blâmer. Il est venu pour construire, pour édifier (voir Luc 9:56). Toutefois, sa compassion n’annule pas ses attentes envers nous d’être responsable et de ne jamais minimiser ou de justifier le péché. « Car moi, le Seigneur, je ne puis considérer le péché avec la moindre indulgence » (D&A 1:31 ; voir aussi Alma 45:16). Si le Seigneur ne peut considérer le péché avec la moindre indulgence, quelle est la loi de l’Évangile qui demande la responsabilité pleine et entière pour le péché ?
C’est la loi de la justice. « Quoi, penses-tu que la miséricorde puisse frustrer la justice ? Je te dis que non, en aucune façon. S’il en était ainsi, Dieu cesserait d’être Dieu. » (Alma 42:25 ; voir aussi le verset 24). « Sans la moindre indulgence » et « en aucune façon » sont des manières différentes pour dire que Dieu tient ses enfants responsables à 100% de leur utilisation du libre-arbitre. Le danger de cette liste anti- responsabilité tient dans le fait qu’elle aveugle ses victimes à leur besoin de se repentir. Laman et Lémuel, par exemple, ne voyaient pas le besoin de se repentir parce que tout était la faute de Néphi. « Si ce n’est pas de ma faute, pourquoi devrais-je me repentir ? ». Ceux qui sont aveuglés ne sont même pas capables de faire le premier pas vers le repentir qui est de reconnaître qu’on en a besoin.
Alma comprenait très bien comment les excuses nous empêchent de nous repentir, comme nous le voyons dans ce verset où il conseille son fils égaré, Corianton :
« Quoi, penses-tu que la miséricorde puisse frustrer la justice ? Je te dis que non, en aucune façon. S’il en était ainsi, Dieu cesserait d’être Dieu […]
Ô mon fils, je désire que tu ne nies plus la justice de Dieu. Ne t’efforce pas de t’excuser si peu que ce soit à cause de tes péchés, en niant la justice de Dieu ; mais laisse la justice de Dieu, et sa miséricorde, et sa longanimité régner pleinement dans ton cœur, et que cela t’abaisse jusqu’à la poussière dans l’humilité. » [Alma 42:25, 30]
Comme nous l’apprenons dans ce verset, ceux qui utilisent des excuses « nient la justice », le principe de Néhor, et croient que la loi de la justice ne s’applique pas à eux. Alma suppliait son fils de ne pas utiliser cette liste. « Ne t’efforce pas de t’excuser si peu que ce soit. » Il enseignait à son fils à être 100% responsable.
Nier la justice de Dieu, ou dire que nous ne sommes pas responsables de nos péchés, c’est aussi nier sa justification dans le pardon de ces mêmes péchés : « Le Seigneur viendrait certainement racheter son peuple, mais qu’il ne viendrait pas le racheter dans ses péchés, mais le racheter de ses péchés. » (Hélaman 5:10 ; emphase ajoutée)
Deux manières de nier la justice de Dieu
Satan réussit à diviser les principes complémentaires de la miséricorde et de la justice lorsqu’une personne succombe à la tentation de nier la justice du Seigneur. Nier la justice de Dieu peut se faire d’au moins deux manières. La première, que j’ai déjà mentionnée, est de nier la loi de la justice par rapport à ses propres péchés, comme Korihor et Néhor s’en sont faits les avocats. La deuxième, qui est tout aussi dommageable, est de ne pas faire confiance à la justice du Seigneur ou à sa sagesse quant à sa rétribution pour les torts que nous avons soufferts.
Dans le film basé sur le classique magistralement écrit Le Comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas, Edmond Dantès, le protagoniste, est un homme honnête et aimant qui devient amer et vengeur après que trois hommes cupides ont porté un faux témoignage contre lui et l’aient piégé dans un complot de trahison. Lorsqu’un procureur corrompu devient complice, Dantès est arrêté le jour même où il doit épouser sa belle fiancée, Mercédès. À dix-neuf ans, il est condamné à la prison à vie dans la tristement célèbre île du Château d’If pour un crime qu’il n’a pas commis.
Après de nombreuses années tortueuses en isolement, il rencontre finalement un autre prisonnier, le vieil abbé Faria, qui, dans sa quête de liberté, a mal calculé la trajectoire du tunnel qu’il a creusé et se retrouve à la cellule d’Edmond plutôt qu’à un mur extérieur et à la liberté. Avec un tunnel qui relie maintenant leurs cellules et rien d’autre que du temps sur les bras, Faria commence à enseigner à Dantès l’histoire, la science, la philosophie et les langues, ce qui fait de lui un homme instruit. Faria lègue également à Dantès un trésor d’une grande richesse caché sur l’île inhabitée de Monte Cristo et lui dit comment le trouver, si jamais il s’échappe.
Sachant que la vengeance pourrait consumer et détruire Dantès, l’abbé Faria lui donne une dernière leçon avant de mourir. La leçon est de ne pas renier la justice du Seigneur.
L’abbé Faria lui dit : « Ne commettez pas le crime pour lequel vous purgez maintenant la peine. Dieu a dit : ‘La vengeance est à moi’ ».
Dantès répond : « Je ne crois pas en Dieu. »
L’abbé Faria dit alors : « Ça n’a pas d’importance. Il croit en vous6. »
Dantès n’est toujours pas convaincu. À la mort de Faria, Dantès élabore un plan astucieux en se cachant dans le linceul de Faria et parvient enfin à échapper à ses quatorze années de tourments au château d’If. Après s’être emparé du trésor, il devient extrêmement riche et prend une nouvelle identité en tant que comte de Monte-Cristo.
Pour les hommes malfaisants qui ont conspiré contre lui, il conçoit un plan élaboré de vengeance avec une punition douloureuse et prolongée – une juste récompense pour les quatorze années où il a à peine survécu dans le donjon où ils l’avaient injustement envoyé.
Avec précision, Dantès met en œuvre son plan, et ses ennemis subissent le châtiment qu’il a soigneusement conçu pour chacun d’eux.
Lorsque nous lisons le livre ou regardons le film du Comte de Monte-Cristo, il y a quelque chose en nous qui veut que justice soit faite contre ces hommes cruels et conspirateurs qui ont infligé tant de douleur à un homme innocent. Il y a en chacun de nous un sentiment d’équité et le désir que le bien l’emporte sur le mal, que les choses perdues soient restaurées et que les cœurs brisés soient réparés. Tant que ces choses ne se produisent pas, il existe un fossé d’injustice que nous avons du mal à réconcilier dans notre esprit et encore plus dans notre cœur, ce qui nous laisse perplexes et nous empêche d’aller de l’avant.
Les gens tentent de combler ce fossé d’injustice de plusieurs façons : en cherchant à se venger, en justifiant leur colère et leur amertume, ou en demandant une réparation légale et des conséquences imposées. Nous finissons par découvrir que la voie du Seigneur est le seul moyen de parvenir à une réconciliation véritable et complète.
L’erreur de Dantès n’a pas nécessairement été de chercher à obtenir réparation et justice selon la loi du pays et de mettre au jour des faits sournois avec des peines appropriées pour les coupables, mais de laisser son désir de justice se transformer en haine, en colère, en apitoiement sur soi-même, en autojustification et en d’autres comportements handicapants figurant sur la liste anti-responsabilité. Il est essentiellement descendu au niveau d’impiété de ses ennemis, et il a utilisé la tromperie, le mensonge et la fraude pour les piéger, tout cela en dehors du processus légal, tout comme ils l’avaient fait pour lui et comme l’abbé Faria l’avait prophétisé.
En s’appuyant sur la loi de Moïse – œil pour œil et dent pour dent – plutôt que sur la loi de l’Évangile, y compris le pardon et la prière pour ses ennemis, Dantès s’est infligé une condamnation à vie de misère et d’amertume. En refusant la justice du Seigneur pour les autres, il a involontairement refusé la miséricorde du Seigneur pour lui-même et a choisi de purger la peine que le Christ avait déjà purgée en son nom. Cela lui a volé une vie de bonheur qui aurait pu être la sienne plutôt que de vouloir se venger.
Avoir foi en Jésus-Christ c’est avoir confiance que grâce à son sacrifice expiatoire, il corrigera toute injustice, restaurera toute chose perdue et réparera toute chose cassée, y compris les cœurs. Il réparera tous les torts, dans le moindre détail. C’est pourquoi, « vous devriez dire en votre cœur : que Dieu juge entre toi et moi, et te récompense selon tes actes » (D&A 64:11).
Comme Edmond Dantès, de nombreuses victimes ont été si cruellement blessées, par exemple dans des affaires de maltraitance, sans qu’aucune justice apparente ne leur soit rendue, qu’elles ont eu le sentiment que le Seigneur exigeait l’impossible en leur demandant de pardonner.
Aussi difficile que le pardon puisse être dans de telles situations, ne pas pardonner est encore plus difficile à long terme car cela pousse une personne vers la liste handicapante de l’anti-responsabilité. Ne pas pardonner est synonyme de blâme, de colère, d’autojustification et d’apitoiement sur soi-même, toutes choses qui figurent sur la liste. Lorsque Satan fait appel à l’une de ces émotions négatives, il commence à exercer un contrôle sur la vie d’une personne.
L’un des moments les plus difficiles à pardonner est celui de la violence conjugale, avec son cortège d’angoisse, de douleur de la trahison et de cruauté. Il existe un schéma intéressant et commun aux cas de maltraitance : l’agresseur blâme presque toujours la victime, tout comme Laman et Lémuel ont blâmé Néphi pour les mauvais traitements qu’ils lui ont infligés. Le Seigneur a averti Néphi de séparer sa famille de ses frères et de leurs mauvaises intentions afin qu’il puisse se protéger et protéger sa famille (voir 2 Néphi 5:1-7). Supposons qu’une femme qui a été cruellement maltraitée reçoive une révélation similaire et qu’elle se sépare de son mari extrêmement violent.
Même si la femme maltraitée est maintenant libérée de l’environnement violent, elle a du mal à pardonner à son mari la cruauté soutenue et croissante. Il semble injuste de lui demander de pardonner sa brutalité alors qu’il ne semble pas vouloir s’en repentir. Il ne semble pas juste qu’elle, l’innocente, souffre alors que lui, le coupable, semble s’en tirer à bon compte. Peut-on trouver la paix sans justice ?
Comme Edmond Dantès, jusqu’à ce que la femme qui a subi des sévices apprenne à pardonner, elle aussi nie la justice de Dieu et n’a pas confiance en Dieu et en sa capacité à juger sagement.
La justice est une loi éternelle qui requiert une punition à chaque fois qu’une loi de Dieu est enfreinte (Alma 42:13-24). Le pécheur doit payer la punition s’il ne se repent pas (Mosiah 2:38-39 ; D&A 19:17). S’il se repent, le Sauveur paie la punition par l’expiation, en faisant appel à la miséricorde (Alma 34:16)7.
Si l’ex-conjoint ne se repent pas, il paiera la punition – « tu ne sais pas combien elles sont atroces, tu ne sais pas combien elles sont extrêmes, oui, tu ne sais pas combien elles sont dures à supporter » (D&A 19:15). La femme saura s’il se repent sincèrement car son repentir inclura les étapes de la restitution en lui demandant humblement et sincèrement qu’elle lui pardonne et en cherchant à faire amende honorable.
Même si la femme comprend la loi de la justice, ce qu’elle ressent est le besoin de justice maintenant. Frère Neal A. Maxwell a sagement enseigné que « La foi en Dieu comprend la foi en ses desseins ainsi qu’en son calendrier. Nous ne pouvons pas l’accepter pleinement tout en rejetant son calendrier8. » Frère Maxwell a aussi déclaré que « l’Évangile garantie la justice finale, pas une justice immédiate9. » « Voici, mes yeux voient et connaissent toutes leurs œuvres, et j’ai en réserve un jugement rapide, en son temps, pour eux tous. » (D&A 121:24).
La loi de la justice et avoir confiance au calendrier du Seigneur permet à la femme de ne plus s’inquiéter de la justice et remet le jugement entre les mains de Dieu : « Voici ce que dit l’Écriture : L’homme ne frappera pas, ni ne jugera ; car le jugement m’appartient, dit le Seigneur, et la vengeance m’appartient aussi, et je rétribuerai. » (Mormon 8:20).
Jeffrey R. Holland a fait part de ces informations utiles :
Ne demandez pas si c’est juste […] Quand il s’agit de nos propres péchés, nous ne demandons pas justice. Ce que nous demandons, c’est la miséricorde, et c’est ce que nous devons être prêts à donner.
Pouvons-nous voir l’ironie tragique de ne pas accorder aux autres ce dont nous avons tant besoin nous-mêmes¹º ?
Ceux qui ont subi des dommages permanents, des souffrances prolongées ou des pertes à la suite d’un péché sont confrontés à un défi bien plus difficile pour pardonner et remettre la justice au Seigneur. Il est à espérer qu’ils trouveront du réconfort dans un enseignement du prophète Joseph Smith : « Que peuvent faire [ces malheurs] ? Rien. Toutes vos pertes seront compensées par la résurrection, à condition que vous restiez fidèle11. »
Jusqu’à ce que la femme maltraitée puisse remettre la justice au Seigneur, elle continuera de ressentir de la colère, ce qui est une forme de dévotion négative envers son agresseur, et cela la garde coincée dans un cauchemar perpétuel. George Albert Smith a appelé cela : « chérir une influence inappropriée12. » Puisque son mari lui a fait si mal, pourquoi la femme devrait elle lui permettre de continuer d’être sa victime en hantant ses pensées ? N’a-t-elle pas assez souffert ? Le fait de ne pas pardonner à son agresseur lui permet de la tourmenter mentalement encore et encore. Lui pardonner ne le libère pas, lui ; cela la libère, elle.
Pour comprendre en partie ce qu’est le pardon, il faut comprendre ce qu’il n’est pas :
- Pardonner au mari qui l’a agressée ce n’est pas excuser ni tolérer sa cruauté
- Pardonner ne veut pas dire oublier sa brutalité ; vous ne pouvez pas ne plus vous souvenir ou effacer un souvenir aussi traumatisant.
- Pardonner ne veut pas dire que la justice vous sera refusée, parce que la miséricorde ne peut voler la justice.
- Pardonner n’efface pas la blessure qu’il a causée, mais cela peut commencer à guérir la plaie et diminuer la douleur.
- Pardonner ne veut pas dire lui faire confiance à nouveau et lui donner une nouvelle chance de vous agresser, vous et vos enfants. Bien qu’il nous soit commandé de pardonner, la confiance se gagne et doit être prouvée par un bon comportement sur la durée, ce qui n’est clairement pas le cas.
- Pardonner ne veut pas dire pardon de ses péchés. Seul le Seigneur peut pardonner les péchés, d’après un repentir sincère.
Voilà ce que pardonner n’est pas. Ce que pardonner veut dire c’est pardonner la folie de son mari – sa stupidité même – à succomber aux impulsions de l’homme naturel tout en espérant « se rendre aux persuasions de l’Esprit-Saint » (Mosiah 3:19). Pardonner ne signifie pas lui donner une autre occasion de vous agresser, mais de lui donner une autre chance au plan du salut.
Cela aidera si la femme comprend « que nous sommes punis par nos péchés et non pas pour nos péchés13. » Elle prendra alors conscience que son agresseur s’est infligé des dégâts bien plus éternels à lui-même que les dégâts temporels sur elle. Et même à présent, son vrai bonheur et sa vraie joie diminuent en proportion inverse à son péché grandissant, parce que « la méchanceté n’a jamais été le bonheur » (Alma 41:10). On devrait avoir pitié de lui à cause de la situation triste et précaire dans laquelle il se trouve.
Le fait de savoir qu’il s’enfonce dans des sables mouvants spirituels pourrait commencer à modifier le désir de justice qu’elle éprouve déjà en espérant qu’il se repentira avant qu’il ne soit trop tard. Avec cette compréhension, elle pourrait même commencer à prier pour celui qui l’a désespérément maltraitée.
Ce changement à l’image du Christ dans son cœur l’aide à pardonner et lui apporte la guérison qu’elle souhaite et mérite tant. Le Sauveur sait exactement comment la guérir parce qu’il connaît précisément sa douleur, l’ayant vécue par procuration.
Dans ce scénario de la femme maltraitée, il y a deux camps – le mari agresseur et la femme victime, qui ont tous deux besoin de l’aide divine. Alma enseigne que le Sauveur a souffert pour les deux : pour les péchés de l’homme et pour l’angoisse, le chagrin et la douleur de la femme (voir Alma 7:11-12 ; Luc 4:18).
Pour avoir accès à la grâce du Sauveur et au pouvoir guérisseur de son Expiation, le Sauveur demande quelque chose de la part des deux.
La clé pour que l’homme accède à la grâce du Seigneur c’est le repentir. Si le mari ne se repent pas, il ne peut recevoir le pardon du Seigneur (voir D&A 19:15-17).
La clé pour que la femme accède à la grâce du Seigneur et lui permettre de la guérir c’est le pardon. Jusqu’à ce que la femme soit capable de pardonner, elle choisit de souffrir les angoisses et la douleur qu’il a déjà souffert pour elle. En ne pardonnant pas, elle nie involontairement sa miséricorde et sa guérison. Dans un sens, elle accomplit ce passage d’Écriture :
Moi, Dieu, j’ai souffert ces choses […] afin qu’ils ne souffrent pas […]
Mais s’ils ne se repentent pas [ou ne pardonnent pas], ils doivent souffrir tout comme moi. [D&A 19:16-17]
Conclusion
Pour résumer, être 100% responsable c’est accepter d’être la personne qui contrôle sa vie. Si les autres sont en faute et doivent changer avant que des progrès ne soient réalisés, vous êtes alors à leur merci et ils contrôlent les résultats positifs ou souhaités dans votre vie. Le libre-arbitre et la responsabilité sont inséparablement connectés. Vous ne pouvez pas éviter la responsabilité sans diminuer votre libre-arbitre. La miséricorde et la justice sont aussi inséparables. Vous ne pouvez pas nier la justice du Seigneur sans entraver sa miséricorde. Oh comme Satan aime diviser les principes complémentaires, et rire de ses effets dévastateurs !
J’invite chacun d’entre vous à éliminer la liste anti- responsabilité ou anti-foi de votre vie, même quand vous avez raison ! C’est une liste anti-bonheur et anti-succès même quand vous avez raison. Ce n’est pas une liste pour les vaillants fils et filles de Dieu qui cherchent à devenir plus semblables à lui. C’est un des principaux outils que Satan utilise pour contrôler et détruire des vies. Le jour où une personne élimine cette liste de sa vie sera le jour où elle reprendra le contrôle des conséquences positives à partir de ce moment-là et elle commencera à aller de l’avant dans la lumière à un rythme accéléré (D&A 50:24).
Je rends mon témoignage avec certitude du nom de Jésus-Christ et du pouvoir et de la joie que la plénitude de son Évangile nous accorde. Il est la vie et la lumière du monde. Les principes dont j’ai parlé aujourd’hui sont les siens. J’en témoigne au nom de Jésus-Christ. Amen.
Notes
1. Il y a trois exceptions à ce principe :
a. Les enfants en dessous de l’âge de responsabilité (voir Mosiah 3:16-18 ; Mosiah 15:25 ; Moroni 8:8 ; D&A 29:46-47 ; 68:27 ; 137:10)
b. Les handicapés mentaux (voir Moroni 8:10)
c. Ceux qui n’ont pas reçu la loi ou l’Évangile (voir 2 Néphi 9:26 ; Mosiah 3:11 ; Mosiah 15:24 ; Alma 42:21)
2. Au début du 16ème siècle, le pape Léon X et l’église catholique vendaient des « indulgences » qui, supposément, servaient pour la rémission des péchés passés et/ou vous libéraient du purgatoire après la mort. Martin Luther y voit une tentative corrompue de vendre le salut, ce qui l’incite à écrire son Débat sur le pouvoir et l’efficacité des indulgences, également connue sous le nom de Quatre-vingt-quinze thèses, puis à l’afficher sur la porte de l’église du château de Wittenberg en 1517. Voir « Martin Luther et les 95 thèses », History Channel, history.com/topics/martin-luther- and-the-95-theses.
3. Samuel Grafton, in his syndicated column « I’d Rather Be Right » (included in Edmund Fuller, Thesaurus of Quotations [New York: Crown Publishers, 1941], p. 272). Edward R. Murrow referred to this quote in his last newscast (22 janvier 1961) in a remark about John F. Kennedy’s inaugural address (see In Search of Light: The Broadcasts of Edward R. Murrow, 1938–1961, Edward Bliss Jr. [New York: Da Capo Press, 1997], p. 346).
4. Attribué à David B. Haight, Formation des Autorités générales, avril 1993
5. Irene Eubanks, « J’ai fait passer mon mariage avant mon orgueil », Le Liahona, janvier 2008, p. 37
6. IMDb’s page for quotes for The Count of Monte Cristo (2002), imdb.com/title/tt0245844/quotes.
7. Guide to the Scriptures, s.v. “justice,” scriptures.lds.org.
8. Neal A. Maxwell, That Ye May Believe (Salt Lake City: Bookcraft, 1992), p. 84.
9. Neal A. Maxwell, Wherefore, Ye Must Press Forward (Salt Lake City: Deseret Book, 1977), p. 116.
10. Jeffrey R. Holland, “Amazed at the Love Jesus Offers Me,” New Era, December 2008; see also original version, Holland, “I Stand All Amazed,” Ensign, août 1986.
11. Joseph Smith, HC 5:362; see also Teachings of Presidents of the Church: Joseph Smith (Salt Lake City: The Church of Jesus Christ of Latter-day Saints, 2007), p. 51.
12. George Albert Smith, CR, October 1905, p. 28; see also Teachings of Presidents of the Church: George Albert Smith (Salt Lake City: The Church of Jesus Christ of Latter-day Saints, 2011), p. 252.
13. Elbert Hubbard, The Note Book of Elbert Hubbard: Mottoes, Epigrams, Short Essays, Passages, Orphic Sayings and Preachments (New York: W. H. Wise, 1927), p. 23; emphase ajoutée.
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Lynn G. Robbins, membre de la Présidence des Soixante-dix de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, a prononcé ce discours le 22 août 2017 pendant la Semaine de l’Éducation à BYU.